mercredi 12 janvier 2011

SENTIMENTS DE L’ÂME

Premier vendredi du mois.

Je me sens les bras ouverts et je crie, demandant le secours de la terre et du Ciel, sans l’obtenir ni de l’une ni de l’autre. J’ai besoin, vraiment besoin d’un bâton pour me soutenir. La tempête ne cesse pas. De tous côtés me vient la dé-faite et moi toujours à plat ventre et plongée dans la boue, je ne peux pas me lever. Si les pierres pouvaient parler, combien auraient-elles à raconter. Mon ignorance ne m’abandonne pas, mes forces ne me permettent pas, mon inutili-té prend tout pour elle. Et moi, je reste sur mon calvaire, sur mon épouvanta-ble calvaire, sans rien posséder, sans rien avoir à moi, même pas un mot tendre pour mon Jésus. Mon corps est transpercé de haut en bas. Il ne s’y trouvent que des flèches, des lances, des poignards et des épines et mon âme ne cesse, elle ne cesse d’agoniser avec lui. Je demande du courage au Ciel pour mon nouveau calvaire, pour mes examens. Mais je ne l’obtiens pas. L’heure n’est pas encore venue. Je ne peux compter que sur ceux auxquels je me suis abandon-née complètement, c’est-à-dire Jésus et la Petite Maman. Si toute l’acceptation de ma croix n’est que pour Eux et pour les âmes, comment pourrais-je être abandonnée par Eux ? Pauvre de moi si la confiance me manque ! Mon âme loue le Seigneur, elle Lui adresse des hymnes de louanges, mêmes quand elle est exsangue, prisonnière, plongée dans la boue la plus compacte. Plongée dans le silence, dans la plus grande agonie, elle s’offre au Seigneur et répète : Oh ! que votre Volonté soit faite ! Quand je pleure dans ma détresse, ce sont des larmes résignées et je les envoie vers les tabernacles. L’inutilité me vole tout, mais malgré cela je ne manque pas de les envoyer vers ces mêmes taber-nacles comme des actes d’amour.

Le Gethsémani d’hier, mon calvaire d’aujourd’hui, ce sont les mêmes souffran-ces, la même préparation pour mon emprisonnement, pour mon exil. Hier, j’ai ressenti l’épouvante de toutes les choses, de toute l’agonie de Gethsémani. J’y étais sans vie, indifférente à tout.

Aujourd’hui j’ai pris le chemin du calvaire. J’ai dis que j’ai pris, mais ce n’était pas moi. Pour ma part, seule ma souffrance l’a pris, ce chemin. Il y avait une vie séparée de la mienne qui était hors de moi et hors du monde, une vie qui était celle du calvaire mais qui ne pouvait plus être immolée. Elle continuait d’être vie, mais sans pouvoir la donner. J’aimerais pouvoir mieux m’expliquer, mais je ne sais pas. C’était la vie, mais elle n’était pas en moi. Cette vie se communiquait au calvaire, mais elle ne pouvait plus se souiller de la terre cou-pable. Ma douleur a vécu tout cela, mais pas moi, car je me sens ne pas avoir de vie. J’ai l’impression que mon corps est disparu du monde, laissant la souf-france occuper sa place, la souffrance, rien que la souffrance. Dans le plus grand abandon et sous le poids des plus grandes humiliations, je suis restée là comme si vraiment j’étais morte. Jésus, la vraie vie, est entré dans mon cœur. Son entrée me fit ressusciter et je l’ai entendu me dire :

― Me voici, me voici, ma fille, en ton cœur. Me voici, me voici, me voici, mon épouse, dans mon palais permanent. Je viens mendier de l’amour par ta croix, par ton calvaire. Comme je m’y sens bien ! Comme je m’y sens bien ! Je suis le mendiant, le mendiant de la souffrance, le mendiant de l’amour. Ma demeure, ma demeure, demeure bénie ici sur la terre. Je mendie de la souffrance sur cette croix, sur ce calvaire. Je mendie de l’amour en ce cœur de mes délices. Ma fille, ma fille, mère, mère des pécheurs, à la manière de ma mère bénie. Ma fille, ma fille, phare et guide, phare de lumière, phare qui attire. Les âmes, les âmes ont besoin de toi. Le monde, le monde compte sur toi. Tu as été créée pour le monde, sans être du monde. Tu as été créée pour les âmes. Celle-ci est la grande vérité de Jésus. Ce fut la mission qu’il choisit pour toi. Tu es calom-niée, tu es poursuivie. Laisse, ma fille, laisse-toi ressembler à moi. Tu es une copie fidèle. Ta vie est la plus grande preuve des merveilles du Seigneur. Cou-rage, courage ! Ne crains rien, ma fille ! Le Ciel, tout le Ciel sera avec toi, sera avec vous. Courage ! Courage ! Le soleil, le soleil va briller, briller, briller sans le moindre obstacle.

― Ô Jésus, je ne me cherche pas, je ne cherche pas pour moi. Je cherche votre gloire. Je ne vois que Vous, je ne vois que les âmes. Lors de mes moments d’effondrement, quand je me rends compte que je suis incapable de résister à la moindre chose, il ne me reste que la confiance, la confiance, sans le senti-ment d’en avoir, Jésus. Je crois, je crois, mon Amour. Je n’ai vécut que de Vous et pour Vous. Je n’ai toujours confié qu’en vous. Jamais, jamais je n’ai confié en moi. Par votre grâce, jamais, jamais, jamais je ne me suis attribuée le moin-dre mérite. Mon néant, ma très grande misère, mon inutilité me sont toujours, toujours présentes.

― Ma fille, pupille de mes yeux, petite fleur eucharistique, je t’orne de mon di-vin Cœur, en avant, en avant, pour Dieu et pour les âmes. Demande de l’amour, demandeur de l’amour envers mon divin Cœur. Ne laisse pas que les âmes se perdent. Invite-les à venir à Moi. Ta souffrance leur parle au cœur; ton sourire, ton silence, ton silence leur parle, leur parle toujours. Courage, cou-rage ! Tout cela est comme une révolution dans les âmes. Courage, courage ! Tout cela ce sont des preuves de mon divin Amour pour elles. Viens à leur se-cours, ne les laisse pas se perdre, ne les laisse pas tomber en enfer.

C’est cela que je veux, mon Jésus. Ah ! si je pouvais mettre un cadenas sur la porte de l’enfer afin qu’elle ne puisse plus s’ouvrir ! Je ne veux pas, non, mon Jésus, qu’une seule âme se perde. Je ne veux pas, non, mon Amour, voir votre divin Cœur blessé. J’ai faim, très faim, mon Jésus, de vous donner des âmes et vous procurer toute consolation. Je ne vis que pour vous, car je vous aime, Jé-sus, je n’ai pas d’autre but dans ma vie sinon vous aimer et vous donner des âmes. Je n’ai rien d’autre, je ne fais rien d’autre, non, non, mon Amour.

― Ta vie n’est pas de la terre, mais bien du Ciel. Viens recevoir la goute de mon divin Sang. L’artiste divin la faite passer. Ta vie est passé [avec la goute], la viens que tu vis, la vie que je te donne. Une nouvelle goute du très précieux Sang de Jésus coule dans tes vaines. Prodige, prodige ! Oh ! prodige merveil-leux ! Demande toujours, demande toujours : une nouvelle vie, une vie pure, une vie sainte ! Demande de la prière, demande que l’on fasse pénitence. Dis, ma fille, que c’est Jésus qui le demande par tes lèvres. Courage, courage ! Reste sur ta croix. Ton Jésus, ton Époux inséparable est ta force. Aie confiance, confie!

― Merci, mon Jésus. Merci, mon plus grand Bien. N’oubliez pas mes deman-des. Vous savez par où je les commence, finissant par demander pour toute l’humanité. Merci, merci, mon Jésus. Merci pour l’amour que vous me don-nez !

(Bse Alexandrina Maria da Costa : Sentiments de l’âme du 3 juillet 1953)

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