lundi 16 avril 2012

QUAND JE SOUFFRE DE LA SORTE…

Béni soit l'amour immense de Dieu!

Une très forte tempête m’absorbait ; une tempête désastreuse, tempête sans issue. J’ai dû luter, j’ai aussi pleuré et offert mes larmes à Jésus. Lui, il vainquit en moi. Sens même que je m’en aperçoive, il m’a soulevée et me mit en route et me fit rompre les ténèbres. Béni soit le Seigneur. Béni soit le grand pouvoir de Dieu, bénie soit la grande charité de Dieu, béni soit  l’amour immense, l’amour infini de Dieu. Voilà ce que je dis habituellement et c’est ainsi que j’arrive à vaincre.
Je sens dans mon cœur de grandes épées, les grands poignards qu’il y a huit jours y sont restés plantés ; plus ils me le percent, plus encore ils me le découpent ; j’ai l’impression qu’ils grandissent à chaque instant. Ces poignards arrivent du milieu du monde ; c’est de là qu’ils atteignent mon cœur ; c’est le monde qui les manœuvre ; ce sont des mains cruelles qui les obligent à me le taillader de ses cruelles pointes très affutées. Quand moi je souffre de la sorte, combien plus doit souffrir Jésus ! Ah ! si je pouvais attirer à moi toutes les souffrances pour empêcher qu’une seule ne blesse le Divin Cœur de Jésus ! [1]


[1] Sentiments de l’âme : 31 janvier 1947.

mercredi 11 avril 2012

LETTRES À UN AMI


DEUXIÈME LETTRE
PREMIÈRE COMMUNION
R., le 25 avril 2004
jour de la béatification d'Alexandrina


Mon ami aujourd'hui est un jour de gloire pour la “Petite malade de Balasar”: Place Saint-Pierre, à Rome, notre Saint-Père Jean-Paul II l'a proclamée bienheureuse.
Image officielle pour la béatification
Quelle joie pour ce petit du nord du Portugal, quel honneur pour l'archidiocèse de Braga, quelle joie et quel honneur pour tout le Portugal! Après la béatification  de Francisco et de Jacinta, les deux voyants de Fatima, une nouvelle bienheureuse est ainsi offerte à la dévotion du peuple lusitanien... Quelle joie!... Quel bonheur!...
Mon ami, mon cœur est en fête et mes yeux se remplissent de larmes de joie! Béni soit à jamais le Seigneur qui nous donne ainsi un nouvel exemple à suivre, et quel exemple, mon Dieu: Alexandrina est un luminaire qui éclairera de sa lumière surnaturelle toute l'Église, pas seulement celle du Portugal, mais toute l'Église universelle.
*****
Lors de ma dernière lettre où je te parlais d’Alexandrina de Balasar, je m’étais arrêté au moment où sa mère, Maria Ana, la fit revenir à la maison, après un essai de travail chez un cultivateur voisin… pour cause de non-respect de contrat moral passé entre eux.
Je continue donc :

Alexandrina parle d’elle

« J’étais tellement vive ― raconte-t-elle dans son autobiographie ―, qu’on m’appelait « Marie-garçon ». Je dominais non seulement les filles de mon âge, mais aussi les plus âgées. Je grimpais aux arbres et je marchais de préférence sur les murs que sur la route » (Autobiographie)[1].
Mais cette vivacité, cette envie de faire le pitre, ne l’empêchait pas d’être une jeune fille sensée et ordonnée, bien au contraire : elle gardait bien les pieds sur terre, si l’on peut dire cela après ce qu’elle vient d’avouer…
« J’aimais bien travailler : je faisais le ménage, je ramassais le bois et je faisais d’autres travaux domestiques ; j’aimais bien que le travail soit bien fait et j’aimais aussi être habillée proprement ».
Dans ce même document elle exprime un regret qui nous montre l’une de ses plus grandes vertus : l’humilité :
« Je trouve en moi, depuis ma plus tendre enfance, tant de défauts, tant et tant de méchancetés… J’aurais bien aimé que depuis le début, ma vie ait été pleine de beauté et d’amour envers Notre Seigneur ».
Depuis son plus jeune âge Alexandrina fut attirée par le ciel, par la prière, par le chant en église, par les dévotions mariales…
« Vers quatre ans ― écrit-elle dans son Autobiographie ―, j’aimais m’attarder à contempler la voûte du ciel. Plus d’une fois j’ai demandé aux miens s’il n’était pas possible, en empilant les maisons et les auberges, les unes sur les autres d’arriver au ciel ».
Sainte naïveté !
« Déjà à cet âge ― dit-elle quelques lignes plus loin ― j’aimais beaucoup la prière, car je me rappelle que ma tante me demandait de prier avec elle pour obtenir de Dieu sa guérison ».
Je ne sais pas, mon ami, si la vie d’Alexandrina ainsi “détaillée” te cause de l’ennui, mais il est vrai que je ne peux pas réduire à la plus simple expression une vie qui est si belle, si remplie de Dieu et de son amour miséricordieux.
Je prends donc le risque de t’ennuyer… mais pour la bonne cause !
Puis elle raconte un premier signe de ce qu’elle-même qualifie comme un appel Dieu :
« À l’âgée de six ans, il m’arrivait de rester, la nuit, de longs moments, à voir tomber sur moi des milliers de pétales des fleurs multi couleurs : on dirait une pluie fine. Ceci se répéta plusieurs fois. Je voyais tomber ces pétales, mais je ne comprenais pas ; peut-être était-ce Jésus qui m’invitait à contempler ses grandeurs ».
Puis, un autre fait qui la marquera pour toujours : sa première Communion, quand elle suivait à Póvoa sa courte scolarité. Elle raconte :
« À Póvoa de Varzim j’ai fait ma première communion. Le Père Alvaro Matos m’a examinée sur le catéchisme, m’a confessée et m’a donné la Communion pour la première fois. J’avais alors 7 ans. Comme prix j’ai reçu un beau chapelet et une image pieuse. J’ai communié à genoux et, malgré ma petite taille, j’ai pu fixer la sainte Hostie de telle manière qu’elle s’est imprimée en mon âme. J’ai cru alors m’unir à Jésus pour ne plus être séparée de Lui. Il a pris possession de mon cœur, ce me semble. La joie que je ressentais était inexprimable. À tous j’annonçais la bonne nouvelle. Ma maîtresse, désormais, me menait chaque jour à la communion ».
J’ai communié à genoux… J’ai pu fixer l’Hostie… Elle s’est imprimée en mon âme… J’ai cru alors m’unir à Jésus pour toujours…
Voici, mon ami, quelques repères importants qui définissent clairement sa spiritualité future, mais déjà embryonnaire dans l’âme et dans le cœur de cette enfant de sept ans.
Plus tard, lorsqu’en extase, son action de grâces et ses prières étaient faites à genoux… Et l’Hostie alors, quel bonheur quand elle en parle dans son “Journal” spirituel qu’elle a appelé “Sentiments de l’âme” !
Mais nous aurons le temps d’y arriver, mon ami, car une autre étape se dessine : celle de sa confirmation :
Église de Vila do Conde
« Ce fut à Vila do Conde,[2] que j’ai reçu, des mains de Son Excellence l’Évêque de Porto,[3] le sacrement de Confirmation. Je me souviens, très bien, de cette cérémonie et de la joie qu’elle m’a procurée. Au moment où je recevais ce sacrement, je ne sais pas bien expliquer ce que j’ai ressenti : on dirait une grâce surnaturelle qui me transformait et qui m’unissait plus profondément à Notre-Seigneur. Je voudrais bien expliquer tout cela, mais je ne le sais pas ».
Alexandrina prie déjà, elle prie beaucoup et semble se sentir heureuse de cette grâce que le Seigneur lui accorde déjà, mais qu’elle ne comprend pas encore tout à fait.
Elle écrit :
« Au four et à mesure que je grandissais, le désir de prier augmentait en moi. Je voulais tout apprendre. Encore aujourd’hui je garde le livret de prières et de dévotions de mon enfance : prières à la Sainte Vierge, offrande quotidienne au Seigneur de mes actes journaliers, prière à l’Ange gardien, à saint Joseph, et plusieurs prières jaculatoires ».
Puis cette attention toute particulière et filiale envers Marie, notre Mère :
« Quand je sortais en promenade avec ma nourrice et avec d’autres enfants, je m’éloignais pour cueillir des fleurs que j’allais ensuite déposer dans la chapelle de Notre-Dame des Douleurs ».
Mais, j’en resterai là pour aujourd’hui… Dans ma prochaine lettre, je te parlerai, mon ami des prières d’Alexandrina. Tu seras certainement agréablement surpris et captivé comme moi je l’ai été.
En attendant, confions-nous à sa protection, car son pouvoir sur le Cœur de Jésus est très grand. Confions-lui nos “bobos” de chaque jour et demandons-lui de nous aider à les amenuiser.
Que la paix et l’amour du Seigneur soient avec toi,
Ton ami dévoué.


[1] Afin de ne pas surcharger la lettre, avec des notes, je te préviens que tous les textes en italique, sont tirés de l’Autobiographie d’Alexandrina, sauf indication contraire.
[2] Petite ville balnéaire, à 3 kilomètres de Póvoa de Varzim.
[3] Monseigneur Antonio Barbosa Leão, duquel Alexandrina conserva une photo jusqu’à sa mort, en souvenir de sa Confirmation.

mardi 3 avril 2012

LETTRES À UN AMI



PREMIÈRE LETTRE

INTRODUCTION

R., le 30 mars 2004

anniversaire de la naissance d’Alexandrina


Mon ami,
Tu me demandes, de te parler d’Alexandrina de Balasar ou plus exactement Alexandrina Maria da Costa.
Selon ce que tu me dis, dans ta région vivent bon nombre de portugais dont une grande partie garde une foi intacte et même militante. En les côtoyant, tu aurais, toujours selon toi, entendu parler de cette personne que tu connais mal, car les renseignements que tu as sur elle sont très succincts.
Alexandrina est ce que l’on pourrait appeler “une âme d’exception” ou encore une “âme-victime” dont la mission première a été celle de veiller sur tous les tabernacles du monde, si délaissés par les fidèles qui ont un peu oublié que Jésus s’y trouve Vivant et Vrai.
Mais, mon ami, je dois te prévenir que je ne pourrai pas résumer sa vie en une seule lettre, car sa vie et son parcours spirituel sont exceptionnels : j’ai peur qu’en faisant court, tu n’apprennes pas grand’chose de sa vie et de sa spiritualité, ainsi que de sa mission au sein de l’Église.
Elle est né à Balasar, petit village du nord du Portugal, entre Braga ― son diocèse ― et Porto, le mercredi 30 mars 1904. Elle fut baptisée le 2 avril suivant qui était samedi saint cette année-là.
Plusieurs faits importants dans la vie d’Alexandrina se sont passés d’ailleurs pendant la semaine sainte…
Mais avant de te parler d’elle je vais rapidement te présenter sa famille : sa mère et sa sœur.

Sa mère

Maria Ana, la mère, Deolinda, la soeur
Joaquim Costa, le parrain d'Alexandrina
Maria Ana da Costa, jeune femme célibataire, issue d’une famille plutôt aisée, s’était laissée convaincre par un homme peu scrupuleux qui lui promettait le mariage mais qui, après lui avoir fait deux enfants ― Deolinda et Alexandrina ― se maria avec une autre, la laissant seule élever ses deux filles.
Se sentant trompée, Maria Ana prit un autre tournant dans sa vie et est devenue un exemple pour son village. En effet, une conversion complète s’opéra en elle et les villageois l’ont vue dès lors assister non seulement aux messes dominicales mais aussi aux messes quotidiennes. Elle s’est chargée du fleurissement des autels, finissant même par avoir les clefs de l’église paroissiale, pour mieux remplir sa tache.
Ce fut alors qu’elle déménagea de Gresufes, lieu-dit à environ un kilomètre de l’Église et vint habiter un autre lieu-dit, près de l’église et qui porte un nom prédestiné : Calvaire.
Dotée d’un mâle caractère, après avoir assisté à la messe matinale, elle s’en allait dans les champs ou de durs travaux l’attendaient ; elle gagnait ainsi son “pain quotidien” et de quoi nourrir ses filles auxquelles elle dispensait une éducation exemplaire, aux dires de ceux qui l’ont connue.

Deolinda

La sœur aînée d’Alexandrina, après sa scolarisation apprit le métier de couturière et confectionnait, pour les gens du village et villages voisins, des chemises, des pantalons et autres habits, ainsi que tous autres genres de travaux inhérents à la couture.
Elle était d’une extrême délicatesse et d’une grande sagesse. Sa vie durant ― elle ne s’est jamais mariée ― elle s’occupa de sa jeune sœur et devint même plus tard sa “secrétaire”. Le Père Mariano Pinho, premier Directeur spirituel d’Alexandrina ― ainsi que de Deolinda ― avoua un jour qu’il ne savait laquelle des deux était la plus sainte.

Alexandrina : premières années

Alexandrina et le Père Mariano Pinho, sj
son premier Directeur spirituel
Alexandrina et sa sœur, lorsque que l’âge scolaire arriva, ont été envoyées par leur mère dans la ville voisine de Póvoa de Varzim, chez des amis qui les hébergèrent pendant dix-huit mois.
Deolinda qui avait déjà quelques connaissances, y appris à lire et à écrire, et y obtint même son seul diplôme de troisième classe. Quant à Alexandrina, elle n’y appris pas grand’chose, car la nostalgie de sa mère et l’envie de revenir à Balasar finirent par avoir raison de la décision maternelle.
Dès qu’elle eut douze ans, elle accompagna sa mère dans les champs où son courage faisait l’admiration de tous : elle finit même par gagner autant que sa mère, c’est-à-dire autant qu’une grande personne.
Ce fut pendant ces temps de travaux qu’un premier incident eut lieu : elle tomba en bas d’un arbre alors qu’elle coupait des branches pour donner à manger aux vaches du propriétaire. Elle eut très mal et dût rester alitée quelques jours.
Sa mère la plaça ensuite chez un voisin, un homme exécrable et méchant qui jouera un rôle très important et déterminant dans la vie de la jeune fille.
Maria Ana lui imposa quelques obligations, dont celle de laisser Alexandrina assister à la Messe tous les dimanches.
Le cultivateur essaya de respecter cet engagement, mais il était libertin, trop libertin et, un jour, vers la fin de l’après-midi il demanda à Alexandrina de surveiller une paire de bœufs pendant que lui il allait à Póvoa de Varzim, pour une affaire, dit-il. La jeune fille accepta, bien entendu… Mais le temps passait et la peur s’installait… Ce ne fut que très tard dans la nuit que son patron est revenu un peu éméché et la gratifia dès son arrivée de quelques mots moins dignes, dont il avait l’habitude. Il venait de passer une partie de la nuit “en bonne compagnie”.
Alexandrina raconta cela à sa mère qui n’hésita pas une seule seconde à retirer sa fille de chez un homme aussi brutal et mal élevé.
La jeune fille devait avoir alors 13 ou 14 ans.
***
Mon ami, je continuerai mon exposé de cette vie extraordinaire, dans une prochaine lettre.
Ton ami dévoué.