dimanche 6 février 2011

JOURNAL SPIRITUEL - “SENTIMENTS DE L'ÂME”

UNE LETTRE À JÉSUS

Balasar, le 19 février 1942.

Mon bon Jésus,

Je sens mon cœur tailladé par la douleur. Aurez-Vous encore d’autres coups à me porter ? Que votre volonté soit faite. Clouée sur la croix avec Vous, saignant et dans la plus grande agonie, je me vois et je me sens abandonnée. Je ne peux pas vivre dans le monde, j’ai peur.

Jésus, venez vite, venez, emportez-moi au Ciel. Les hommes tente d’écarter de moi, de m’arracher pour toujours ce qui me procurait quelque soulagement, qui pouvait me réconforter. Ils m’ont pris mon Père spirituel, ils lui ont interdit de m’écrire et à moi de ne plus lui envoyer de lettres. Je suis seule au milieu de la tempête et celle-ci ne se calme pas.

Je vous ouvre mon pauvre cœur, Vous seul savez y lire ce qu’y est écrit avec douleur et sang ; Vous seul comprenez et pouvez évaluer ma souffrance. Le monde l’ignore, les hommes n’y comprennent rien. Laissez-moi Vous dire ce que Vous avez dit à votre Père Éternel :

“Pardonnez-leur, mon Jésus, car ils ne savent pas ce qu’ils font !” Ils sont aveugles, il leur manque votre divine lumière : éclairez-les tous et donnez à tous votre amour.

Ô Jésus, tous mes pressentiments se sont avérés exactes. Pourront-ils encore m’interdire de vous recevoir sacramentellement ? Pauvre de moi, cela serait le coup qui m’ôterait la vie, si Vous avec votre divin pouvoir ne me conservez pas la Communion.

Qu’ils disent ce qu’ils voudront, qu’ils fassent ce qui leurs plaira, ce qu’ils ne m’ôteront jamais c’est cette union avec Vous.

Me priver de Jésus sacramentel, oui, je ne doute pas qu’ils le fassent ; ôter de mon cœur le très riche trésor que j’adore, que j’aime plus que toute autre cho-se, le Père, le Fils, le Saint Esprit, cela, jamais, jamais les hommes y parvien-dront : il aurait fallu qu’ils me fassent vivre sans cœur et sans âme.

Impossible ! Que vienne la force du monde entier et que toute cette force se jette contre moi : mais, me séparer de cette grandeur infinie, de cet amour in-fini, cela jamais ! Seul le péché, lui seulement pourrait m’en séparer.

Mais j’ai pleinement confiance en Vous ; c’est de Vous, mon Jésus, que j’attends tout, malgré le ressentir de mon âme arrive presque à me persuader : que je me trompe moi-même : je sens que je ne Vous aime pas, je sens que je ne peux rien attendre de Vous à cause de ma misère qui est si grande.

Quelle confusion que la mienne ! Combien grande est ma détresse !

Soulevez-moi, mon Jésus, aidez-moi, même ainsi clouée à la crois, à monter tout le chemin douloureux du calvaire. À chaque escalier par où je passe, je veux laisser écrit avec le sang que de mes plaies s’écoule :

C’est pour Jésus que je souffre, c’est pour lui donner des âmes que je chemine !

Jésus, Jésus, je ne vois pas le Ciel, tout le bleu du firmament s’est éloigné de moi, je l’ai perdu, on m’a volé ce qui était ma vie. Je ne sens que douleur, je ne sens et ne vois que la mort. Je n’ai pas à qui recourir : ce n’est que Vous et la Mãezinha que je peux appeler.

Pauvre de moi ! Combien de fois à cause de ma souffrance je n’ose même pas Vous regarder !

Écoutez-moi toujours, même quand je ne vous appelle pas ; demandez à la Mãezinha qu’Elle m’aide, donnez-moi toute la force du Ciel !

Tous les bruits que j’entends me rappellent mon Père spirituel. Est-ce lui qui arrive ? Quelle vie d’illusions !

Chaque pensée qui me vient en tête sur mon pénible état, ce sont comme des flèches qui se plantent dans mon cœur, ce sont comme une flagellation qui met en lambeaux mon cœur et mon âme. Quel mal ai-je fait ? Quel crime ai-je commis ?

Ô mon Jésus, si ce n’était pas votre amour, si ce n’était pas cet ardent désir de Vous donner des âmes, je me refuserais à tout cela. J’aimerais Vous aimer beaucoup, ne jamais Vous offenser pour gagner le Ciel, mais je ne voudrais pas — sur la terre — la crucifixion, je ne voudrais point entendre votre douce voix, je n’aimerais pas regarder votre divine Image, ni douloureuse ni glo-rieuse : j’aurais une éternité entière pour Vous contempler et pour vous enten-dre parler.

Pardonnez mes épanchements, Jésus, Vous savez bien que Vous êtes le seul avec qui je peux m’épancher.

Vous avez voulu me choisir pour la souffrance, Vous m’avez destinée à de si grands martyrs, voici votre victime, voici votre esclave, Jésus, faites de moi ce qu’il Vous plaira.

Accordez-moi ta bénédiction, mon Aimé. Dis à la Mãezinha qu’Elle me bénisse et me protège. Je suis ta plus indigne fille, la pauvre

Alexandrina