mercredi 24 septembre 2008

DOCTEUR AZEVEDO

Le “bon samaritain” d'Alexandrina

Dans l’Autobiographie d’Alexandrina, nous trouvons un long passage où elle parle longuement de son médecin traitant, le docteur Manuel Augusto Dias de Azevedo.
Leur première rencontre eut lieu le 29 janvier 1941, d’une façon imprévue. En effet, accompagné d’un prêtre et de plusieurs autres personnes il rendit visite, ce jour-là à la “Petite malade de Balasar”.
Elle dit, en effet, que ce ne fut qu’un long moment après leur arrivée et de conversation “qu’elle apprit que parmi eux se trouvait un médecin”, ce qui la rendit un peu gênée, non point qu’elle “ait dit quelque mensonge au sujet de sa souffrance”, mais plutôt à cause de l’effet de surprise.
Cette visite n’est pas un fait du hasard, mais une grâce divine, car ce bon médecin que Jésus lui-même surnommera le “Bon Samaritain” deviendra non seulement le médecin traitant d’Alexandrina mais aussi et surtout son défenseur lors des crises les plus graves dans la vie de la Bienheureuse fille de Balasar.
A la fin de l’entretien il se pencha sur elle, et “commença à l’examiner minutieusement, mais avec beaucoup de prudence et de tendresse”, avoue la malade.
Non point pour satisfaire des désirs personnels ou s’acquérir davantage de renommée, mais pour la défense d’Alexandrina, le Dr. Azevedo va faire en sorte qu’elle soit examinée par un certain nombre de grands spécialistes portugais de renom international. Elle sera alors soumise à des examens délicats et difficiles, mais qui s’avèreront par la suite d’une importance capitale, surtout en ce qui concerne son jeûne et son anurie. Le certificat délivré par le Dr Gomes de Araujo, par exemple, fut déterminant dans le procès de béatification.
Le Dr. Augusto de Azevedo sera l’un des meilleurs témoins à avoir déposé lors du procès diocésain : son témoignage est un exemple de sobriété, en même temps que de dévotion non dissimulée. En effet, s’il est vrai qu’il a beaucoup donné, il a aussi beaucoup reçu d’Alexandrina ou par son intercession.

* * * * *

« Le 29 janvier 1941, j’ai reçu la visite d’un Prêtre connu, lequel était accompagné de plusieurs personnes de sa paroisse. Dès son arrivée, il me les a présentées, mais ce n’est qu’après un long moment de conversation que j’ai appris que parmi eux se trouvait un médecin. Sachant cela, je me suis sentie gênée, non pas que j’ai menti, en parlant de ma souffrance, mais tout simplement parce que je ne m’attendais pas à sa présence. Il est toutefois resté discret et souriant. Je ne sais pas ce que je ressentais pour lui au plus profond de moi. J’étais alors loin de penser qu’il deviendrait dans quelques instants mon médecin traitant.
Il a commencé à m’examiner minutieusement, mais avec beaucoup de prudence et de tendresse. Son examen terminé, il lui a paru judicieux d’inviter le Dr Abel Pacheco, jusqu’alors mon médecin traitant, afin de l’informer de son diagnostique. Cela m’a peinée, car j’en avais assez d’examens médicaux, mais j’ai cédé, ayant toujours en vue la volonté de Notre Seigneur et le bien des âmes.
Le premier mai de la même année j’ai été examinée par le docteur Pacheco. L’examen a duré peu de minutes, mais il a été la cause de grandes souffrances pour mon corps et pour mon âme : pour le corps parce que ses mains semblaient de fer ; pour l’âme parce que je ressentais déjà les humiliations et les résultats de cet examen. Malgré cela, j’étais encore loin d’en voir le bout ! J’ai été informée par le docteur Dias de Azevedo qu’il serait mieux que je retourne à Porto afin de consulter le docteur Gomes de Araujo, si telle était la volonté de Notre Seigneur
[1]. Il m’a suggéré de demander la lumière divine e, car il ne voulait en rien contrarier le Seigneur.
Pendant un mois j’ai prié pour savoir si c’était bien là la volonté de Dieu. Plus je demandais de la lumière et plus les ténèbres augmentaient et plus profonde devenait la souffrance de l’âme, car je ne savais pas quoi faire. Finalement, le Seigneur m’a dit que c’était sa divine volonté que je parte à Porto.
Mon état physique était assez grave. Ils craignaient de me sortir de mon lit pour un aussi grand voyage. Moi-même je craignais beaucoup : si, rien que le fait de me toucher était cause de grandes souffrances, comment pouvais-je aller aussi loin ?... Encouragée par les paroles de Notre Seigneur, j’avais confiance en lui et sous sa divine action, je me suis préparée pour partir à l’aube du 15 juillet 1941.
À quatre heures, j’avais déjà fait mes prières. Pour montrer que j’en étais contente, j’ai appelé ma sœur pour lui dire que “nous allions en ville” : rien que pour cacher ma douleur. Pendant que je lui disais cela, j’ai entendu la voiture qui arrivait chez nous.
Le docteur Dias de Azevedo et un monsieur de nos amis
[2] sont entrés dans ma chambre. Après une courte conversation, pendant que ma sœur s’habillait, nous nous sommes préparés pour partir. Nous avons pris la route à 4,30 heures, afin de ne pas alarmer la population ; il faisait encore nuit. En effet, nous sommes sortis du pays sans rencontrer personne.
Mon âme était encore ans dans un plus grand silence ! Plongée dans un abîme de tristesse, sans interrompre mon intime union avec Jésus, je voyageais Lui demandant toujours davantage de courage pour les examens qui m’attendaient et en offrant mon sacrifice afin d’avoir son divin Amour et pour les âmes. J’invoquais aussi la Maman du Ciel et les saints qui m’étaient les plus chers. Rien ne m’attirait et, tout ce que je voyais me causait une profonde tristesse. De temps à autre ils interrompaient mon silence pour me demander si j’allais bien ; je les en remerciais sans même sortir de l’abîme dans lequel j’étais plongée. Il faisait jour déjà quand nous sommes arrivés à Trofa, chez la personne qui nous accompagnait : là je devais me reposer et recevoir mon Jésus, en attendant de repartir pour Porto. Avant de reprendre le voyage, j’ai été portée dans le jardin de monsieur Sampaio et, soutenue par l’action divine, je me suis approchée de quelques petites fleurs que j’ai cueillies en pensant : « — Le Seigneur, quand Il les a créées, savait déjà qu’aujourd’hui je serais venue les cueillir. » Ensuite j’ai été photographiée à deux endroits différents et, de l’un à l’autre, je me suis déplacée toute seule, ce qui n’était plus jamais arrivé depuis que j’avais pris le lit
[3], de la même façon que plus jamais je ne m’étais retournée dans mon lit sans aide de quelqu’un. Ce fut un miracle divin, car sans lui, je n’aurais pas pu le faire.
Nous avons repris le voyage : mon âme souffrait horriblement. À six kilomètres de Porto, Notre Seigneur a retiré son action divine. J’ai commencé à ressentir les habituelles souffrances physiques qui m’ont tourmentée jusqu’à la fin du voyage. J’ai dit alors, non pas parce que je connaissais la distance, mais parce que mon état me l’a fait dire : « — Nous sommes déjà proches de Porto. » Quelqu’un a répondu : « — Nous arrivons, nous arrivons ! » En effet, j’avais pu voir qu’il ne manquait plus que six kilomètres.
La sortie en voiture vers le cabinet a été douloureuse, autrement dit : martyre pour le corps, agonie pour l’âme; il me semblait que j’allais mourir.
Avant d’entrer dans la salle des consultations, j’ai dit à celui qui me portait dans ses bras : « — Posez-moi, posez-moi, même si c’est sur le carrelage ! » À ce même moment le médecin est arrivé et il me fit coucher sur un brancard, où je suis restée en attendant la visite. Quelques instants avant que je ne rentre dans le cabinet, Jésus m’a libérée de l’agonie de l’âme, ne me laissant que les souffrances physiques, afin que je puisse mieux résister.
L’examen a été assez long et douloureux. Pendant que je me déshabillais, quelqu’un m’a dit de ne pas m’affliger. Moi, me souvenant ce que l’on avait fait à Jésus, j’ai dit : « — Même Jésus a été déshabillé. » Et je n’ai pensé à rien d’autre. Le docteur Gomes de Araujo, même si un peu brusque, a été prudent et attentionné.
Pendant le retour à la maison, Jésus a exercé sur moi son action divine, afin que je résiste au voyage, mais il m’a laissée de nouveau l’âme angoissée. Arrivés à Ribeirão je suis allée me reposer chez le docteur Azevedo afin d’attendre la nuit et de pouvoir rentrer au village sans que nul ne s’en rende compte.
Que ce soit dans l’une comme dans l’autre maison, j’ai été traitée avec beaucoup d’attentions, mais nul ne parvenait à me réconforter, alors même que je souriais pour cacher le plus possible ma douleur. Il faisait déjà nuit quand nous avons repris le voyage. Tout m’invitait à un silence de plus en plus profond. J’étais indifférente à tout. Pendant le trajet, je n’ai rien vu d’autre que les fleurs du jardin de Famalicão parce que quelqu’un me les avaient signalées. Nous sommes arrivés à la maison à minuit, obtenant ainsi, que personne ne se soit rendu compte de notre absence.
Après ce voyage, mes souffrances physiques ont assez augmenté. Tout ce que je devais souffrir le jour du voyage, Notre Seigneur me l’a gardé pour le lendemain, allant de plus en plus mal. »
[4]

[1] L’un des plus grands neurologues du Portugal.
[2] Monsieur Antonio Sampaio de Trofa.
[3] Sauf pendant les extases de la Passion, où elle n’avait pas besoin d’aide pour accomplir tous les gestes et déplacements.
[4] Autobiographie.

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